Culture > Musique > Vachers sous amphétamines
26 novembre 2009

Ça fait du bien ! Ça fait du bien en maudit d’aller perdre quelques litres d’eau dans un show survitaminé. Ça fait du bien de se remettre les yeux et les oreilles dans la country pop-rock sans façons d’un band Québécois qui a le tour pour faire pogner le party. Ça fait du bien de se remettre les yeux et les oreilles sur une de ces violonistes que la culture Québécoise sait si bien faire éclore.

Ne me demandez pas comment, au fil des années, j’ai réussi à passer au travers des opportunités d’aller voir les Cowboys fringants sur scène. Le manque est comblé, l’erreur réparée. C’était hier soir, c’était au Zénith de Paris, c’était un bon gros fun noir.

Je ne sais pas ce qu’ils mettent dans leur Red Bull, mais même les plus frigides du trémoussage de postérieur n’ont pu rester indifférents à l’énergie déployée sur scène et débordant de la scène pour coloniser la salle. Ce ne sont que quatre gars, une fille, mais quelle fille. Marie-Annick Lépine, c’est l’orchestre symphonique de Montréal à elle toute seule. Ou plutôt non, c’est la culture musicale populaire Québécoise (plus quelques extras) à elle tout seule ; piano, violon, accordéon, mandoline, et ce truc bizarre à tube en plastique dont le son peut rappeler le ruine-babine, et j’en passe autant que j’en oublie. De quoi ne joue-t-elle pas ? Elle est également dotée d’une voix pure et fragile que nous n’avons presque pas entendue, parce que ce n’était pas une soirée pure et fragile. Elle est néanmoins le support mélodique des Cowboys Fringants qui s’y entendent en matière de mélodie. Les boyz du band (je sais, elle est facile, mais je m’amuse d’un rien) font chant, guitare, basse de folie, drums, piano, mettent le feu à la salle et font monter l’hygrométrie, tout comme la température moyenne de la fosse.

Curieuse fosse, à vrai dire, où le trentenaire est considérablement représenté, même s’il est au plafond d’âge de cette mer de bras sur lesquels passent parfois des corps portés par la marée, flottants, coulants, renfloués. Dans cet océan, la pression augmente avec la proximité de la scène, les odeurs mêlées de corps et de mari font confusément penser à l’incontinente moufette. Pas terrible, mais on oublie vite car tout s’oublie vite ; oubliez la poésie des Cowboys parce que, d’abord, le son était limite et ensuite parce que les disques sont là pour ça. Oubliez les textes engagés, d’abord parce trop souvent primaires, ce ne sont pas ceux qui rendent justice à leur écriture et ensuite parce que quelle que soit l’écriture, ils savent sacrément s’y prendre pour la mise en musique. Ce soir là, ce sont la musique et l’ambiance qui comptaient.

Un show des Cowboys fringants demande de l’échauffement. J’étais en retard, j’ai couru ; ça a servi. Eux sont venus pour une prestation alors ils ne sont pas restés le steak collé à leur fauteuil de parterre. Ils brassent, sautent, courent, dansent, jouent avec ce qu’ils ont sous la main ; pied de micro, ballon, avion en papier… brefs, ils font le show, ils font la job et même l’archet de Marie a du mal à tenir le rythme, échevelé, perdant ses crins à mesure que les notes fusent dans l’air surchauffé, mais la belle ne lâche rien, pas plus que ses compagnons. On en redemande et ils reviennent ; une fois, deux fois, trois fois. La salle chante dans le silence pour les rappeler. Ils oublient qu’un rappel c’est une ou deux chansons ; ils reviennent comme ils ont commencé ; à fond de train, à fond de répertoire. Ce ne sont plus des rappels ; c’est une troisième mi-temps sans la bière. Ils en donnent autant qu’ils en ont. La cravate de Karl éponge. J’espère qu’il en change de temps en temps.

On sort un peu vidé, beaucoup rempli. Ils diront ce qu’ils voudront du Québec dans leurs chansons les plus réactionnaires ; au moins, on sait y allumer un public. Les vaches sont loin des ces Cowboys là, mais pour le reste… qu’est-ce qu’ils mettent dans leurs pétards ?

Pour les Français qui ont du mal avec ce texte :

Show : spectacle (si, si)
Cowboy : vacher (je sais, on a tendance à l’oublier)
Band : groupe
Faire pogner le party : mettre le feu (au sens figuré, bien entendu) dans une fête
Party : fête
Fun noir : gros gros fun
Fun : un petit peu plus que du plaisir
Ruine-babine : harmonica
Drum : batterie (drummer : batteur)
Mari : abréviation pour marijuana
Moufette : putois
Steak : dans ce contexte et à niveau de vocabulaire équivalent ; le (gros) cul
Fauteuil (ou chaise) de parterre : siège de camping qu’on emmène dans les festivals d’été dont les mieux équipés sont munis de porte bière et d’un toit et où l’on s’évache un peu trop aisément, bédaine sur les genoux, Bleue en main, bref, vraiment pas un siège pour show des Cowboys.
Bleue : Marque de bière
La job : Le job

Repères

La presse Québécoise en parle (mise à jour):

La Presse sur cyberpresse.ca (Louis-Bernard Robitaille)
Ici, l’auteur oublie un peu de dire que la façon dont les Cowboys Fringants se sont imposés au Québec est assez similaire (bien que plus lente)

La Presse Canadienne sur cyberpresse.ca (Michel Dolbec)

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