des Mots > Dis, Papa > Dis, Papa, qui a fait le premier œuf ? Et la première poule ?
20 août 2014

Note : Pour ne pas léser les vacanciers, je publierai “comment on fait les bébés” à la rentrée. Arrêtez donc de râler.

Avertissement : la lecture de cette histoire à Ti-Cul – 8 ans – a généré un nombre effrayant de questions subsidiaires. J’en ai tenu compte, autant que possible, mais je recommande une certaine disponibilité intellectuelle si vous voulez la lire telle quelle à votre progéniture. Et si vous avez engendré un génie, envoyez-le lire l’article de wikipedia sur le sujet et enfermez-vous à double tour.

poule-et-oeufEst-ce que c’est une poule qui a fait le premier œuf, ou bien est-ce que c’est un œuf qui a fait la première poule ? C’est une très vieille question que tu poses là.

Il y a très, très, très longtemps. Bien avant ta naissance, bien avant ma naissance, bien avant la naissance des dinosaures et même bien avant la naissance de ton grand-père, les poules n’avaient pas du tout l’air de poules. C’était une époque ou les animaux se ressemblaient tous un peu : ils avaient à peu près la tête d’une grosse patate molle.
Oh, on peut dire qu’ils n’étaient pas beaux à voir, les animaux de ce temps là. Ils étaient visqueux comme ce qui sort de ton nez quand tu es très enrhumé. Certains se laissaient flotter dans l’eau, un peu comme les méduses d’aujourd’hui, et d’autres se trainaient mollement sur la terre à la manière des limaces, la bouche au ras du sol pour manger de l’herbe ou d’autres animaux plus petit qu’eux.
Pour faire des bébés, tous les animaux faisaient pareil depuis la nuit des temps : ils se séparaient en deux. Cela faisait deux patates molles plus petites et lorsqu’elles avaient grossi à nouveau, ils pouvaient à nouveau se diviser en deux et ainsi de suite. C’est une méthode qui est encore utilisée aujourd’hui, mais seulement pour des toutes petites choses bien molles et voilà pourquoi :

Les animaux de cette époque là ne ressemblaient pas à grand chose et certains commençaient à ne pas aimer ça. Les poules, par exemple, n’aiment pas être toutes molles.
Les animaux ont donc commencé à vouloir prendre une forme d’animal en fonction de ce qu’ils aimaient. Certains, par exemple, se sont dit qu’il serait intéressant d’avoir des pattes, alors que d’autres on préféré continuer à ramper. Les premiers sont devenus moins mous pour pouvoir marcher alors que les les seconds ont durci la peau de leur ventre pour mieux glisser sur le sol. Ils ont fait ça petit à petit ; ça a pris beaucoup de temps.
Mais cette évolution commençait à leur poser un problème : en devenant moins mou, se séparer en deux commençait à leur faire mal comme s’ils se déchiraient. Quand à ceux qui avaient des pattes, ils ne savaient plus très bien où se séparer en deux, parce qu’il y avait toujours un bout qui manquait de pattes. Il fallait donc trouver autre chose.

Création Pierre Hermé
Création Pierre Hermé
Chaque animal essaya donc de nouvelles techniques. Par exemple, un jour, un des animaux eut l’idée de se séparer en deux par l’intérieur, là où c’était le plus mou. Tout le monde vint assister à cet essai qui se solda par un échec. En effet, l’autre bout de lui-même était trop gros pour sortir par la bouche, le nez ou les fesses.
Un autre essaya alors de séparer juste des petits bout de lui-même à l’intérieur, et de le faire sortir pour qu’il grandisse à l’extérieur. Mais le premier petit bout se fit manger tout de suite par un autre animal qui passait par là et le second n’arriva pas à grandir parce qu’il ne trouvait pas de nourriture à sa taille. Finalement, il se fit manger aussi.
Un autre animal essaya alors autre chose : il fabriqua une place dans son ventre pour que le tout petit bout puisse grandir jusqu’à ce qu’il soit assez grand pour se débrouiller dehors.
Évidemment, il a fallu trouver le meilleur réglage pour le faire sortir avant qu’il ne soit trop grand. C’était un peu compliqué, mais finalement, tous les animaux adoptèrent cette façon de faire des petits, et cela dura un petit moment comme ça.

Quelques années plus tard, un animal qui commençait à ressembler à une poule trouva que cette solution posait un gros problème. Pourquoi ? Parce que la poule n’aime pas le caca. Elle avait déjà fabriqué des pattes moches, mais toutes fines pour se salir le moins possible en marchant dedans et ne supportait pas l’idée de faire sortir la petite poule par le même trou que son caca. Les poules, ça n’aime pas les mauvaises odeurs.
Elle avait bien entendu essayé de le faire sortir par la bouche parce que les poules, ça essaie tous les orifices, et elle devait bien avouer que ça marchait bien mieux par le derrière. Elle chercha autre chose.
D’abord, elle essaya de recouvrir la petite poule avec une protection molle pour qu’elle reste propre, mais quand elle sortit, elle ne fut pas capable de se débarrasser de la protection qui ne se déchirait pas. En séchant, elle lui fit même une peau de lézard et les poules, ça n’aime pas avoir la peau sèche. Elle essaya ensuite avec une carapace dure, mais elle était trop solide et une partie resta collée à la petite poule. On prétend d’ailleurs qu’elle serait devenue la première tortue.

Sticker mural stickers.plage.fr
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La poule s’énerva un peu. Les poules, ça n’est pas toujours patient. Elle se dit que ce serait sans doute plus facile en mettant la petite poule dans une coque plus fine, mais celle-ci cassa quand elle essaya de l’y faire entrer. Elle pensa que ce serait possible si l’œuf était préparé ouvert comme un Kinder surprise, mais il aurait alors fallu qu’elle grossisse beaucoup pour avoir la place de mettre tout ça dans son ventre. Et la poule, qui se trouvait déjà bien belle et commençait d’ailleurs à faire pousser une tête pour regarder le monde de plus haut, ne voulait pas grossir. Les poules, ça n’aime pas grossir.
Elle eut alors une idée de génie : au lieu de mettre la petite poule dans l’œuf, elle y mit le petit bout d’elle même avec assez de nourriture pour grandir. Ainsi, il était protégé et ne se salissait pas en sortant. En plus, comme le petit bout ne grandissait pas dans son ventre, elle ne grossirait pas.
Satisfaite, elle pondit son premier œuf. Bien entendu, elle ne pensa pas à le couver tout de suite, parce que les poules, ça ne réfléchit pas beaucoup.
Le petit bout d’elle-même ne grandissait donc pas parce qu’il se sentait très bien dans cet œuf là : il n’avait ni trop chaud, ni trop froid et c’était douillet. La poule s’assit alors dessus pour faire monter la température parce que les poules, ça a les fesses chaudes, et comme elle trouvait que la chaleur n’arrivait pas assez vite, elle décida de se faire pousser des plumes pour donner encore plus chaud à l’œuf. Le poules, ça aime bien les plumes. Le petit bout d’elle-même eut soif, puis faim et finit par se décider à manger, et donc, à grandir dans l’œuf.

Enfin, le petit bout devint une petite poule. Mais ce fut encore bien difficile de casser cette coquille dans laquelle elle avait grandi. On essaya de donner des coups de pied dedans, de sauter dessus ou de la faire aller et venir contre un rocher parce que le va et vient est un mouvement prisé des poules ; rien n’y faisait. C’est en utilisant un petit marteau qu’elle finit par délivrer le petit.
Ce faisant, la poule se cassa un ongle parce que les poules, ça a les ongles fragiles. Elle décida donc en même temps que les travaux manuels n’étaient pas bons pour les poules et qu’il leur fallait un outil à utiliser sans les mains pour casser l’œuf. Et quoi de mieux qu’un bec ? Elle l’essaya, ce qui la fit caqueter au lieu de parler. Et comme les poules aiment bien caqueter, elle décida que les poules auraient désormais un bec.
C’est ainsi que le petit de la poule pu sortir tout seul de l’œuf en cassant la coquille avec son bec. Il était même déjà capable de marcher : la poule trouva ça parfait, le nomma “poussin” et décréta aussitôt qu’elle était l’animal le plus intelligent de la terre.

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Pendant ce temps, d’autres animaux essayaient aussi de faire passer leur petit par un autre endroit que le derrière. Ils inventèrent donc un second passage, exprès pour les mamans. Ils n’eurent donc pas besoin de coquille, de plumes, de bec et préférèrent avoir des poils pour réchauffer leur petit à la naissance.

La poule, de son côté, se fichait bien des autres. Les poules, ça n’a pas grand chose à faire des autres. Elle se mit à caqueter tant et si bien sur son succès que de nombreux animaux, convaincus par cette technique, se mirent aussitôt à faire des œufs. Même les dinosaures qui venaient d’apparaître et dont les bébés étaient très gros, en firent. La poule ne se sentit plus de joie, serra les fesses parce que les poules aiment bien serrer les fesses quand elles ont du succès, monta sur ses ergots parce que les poules aiment bien se percher haut et s’offrit une belle parure de plumes parce que les poules aiment s’offrir des trucs voyants.
Certaines poules adoptèrent définitivement cette mode, mais avec leurs fesses serrées, elles ne purent pas pondre d’œufs. C’est ainsi que naquirent les coqs.

Tu vois que si la poule a fabriqué le premier œuf, c’est aussi grâce à l’œuf que la poule ressemble à une poule. C’est pour ça qu’encore aujourd’hui, on ne sait pas très bien qui a commencé.

J’espère que cette (longue) histoire vous a plu. N’hésitez pas à me proposer de nouveaux sujets pour que les “pourquoi” de vos enfants trouvent une réponse.

crédit photo : Jean-Marc Linder

4 thoughts on “Dis, Papa, qui a fait le premier œuf ? Et la première poule ?”

  1. Trop chouette. 🙂
    C’est drôle que vous abordiez l’apparition de la vie sur terre car, c’est justement la question de mon fils (6ans). Mes réponses étant ou trop technique ou trop vague j’ai opté pour m’appuyé sur un livre mais si le coeur vous en dit d’approfondir le sujet à votre manière je suis preneuse.
    Encore merci pour ces belles histoires

    1. Un blog n’est parfois rien qu’un brouillon de livre sur un écran. Je suis content que mes histoires vous plaisent : il y en aura d’autres.

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