des Mots > Paf, le chien
28 mai 2015

Faîtes pas ch...Vous connaissez l’histoire de Paf, le chien ?

C’est l’histoire d’un chien, vous vous en seriez douté. Remarquez bien que l’histoire pourrait tout aussi bien fonctionner avec un gros chat, un petit cochon ou même un singe pour peu que ce soit un animal citadin, puisque l’histoire se déroule en ville. En l’occurence, il s’agit d’un chien. Un chien banal. N’importe quel chien, quoi, ne venez pas me chercher avec la race pourvu qu’il fasse au moins 25 cm au garrot. Et moins de un mètre aussi, parce que ça ne marche pas avec cheval.

Le chien, donc, aimable bâtard ou corniaud rassi au poil aussi doux que celui de la vieille tante qui pique (Oui, ce supplice auquel vous soumettez vos bambins une fois l’an lorsque, bouffis du regret de ne pas vous occuper de votre famille plus ou moins lointaine et plus ou moins poilue autant qu’il le faudrait, vous les lâchez lâchement dans ses bras tentaculaires. Là, ils étouffent sous les poutous rêches de la vieille fille pendant que vous lui souhaitez une bonne année et, non sans hypocrisie, une bonne santé). Si l’histoire mettait en scène un superbe chien de race, elle ne serait pas si drôle. Sauf pour les communistes.

Le chien, disais-je, faisait sa petite ballade digestive en solitaire, c’est à dire sans promener son maître au bout d’une laisse. Le chien n’a d’ailleurs ni collier ni maître ; c’est un chien libre. Et puis s’il en avait, cela ne changerait pas grand chose sauf que ce serait une histoire triste.

Soudain, au détour d’un tronc ou d’un réverbère au pied duquel il était allé s’égoutter la bistouquette, que voit-il ? On se le demande et je vous donne aussitôt la réponse ; une chienne. Cela n’a rien d’extraordinaire, me direz-vous, mais c’était une des ces chiennes dont la rencontre vous fouette d’un désir subit. Je parle pour notre chien, parce que moi, les chiennes, n’est-ce pas… enfin… bon, bref.

Le chien la regarde par intermittence, c’est à dire lorsque le flot de voitures le lui permet. La chienne, un camion, la chienne, une voiture, la chienne etc. En effet, et c’est là le drame, la demoiselle canine est sur le trottoir d’en face, et les automobilistes ne semblent avoir cure de lui gêner la vue.
Par exemple, cet espèce de gros chauffard adipeux, il s’en fiche comme de sa première femme, du chien, ce crétin flasque à la graisse calée derrière son volant en fourrure homologuée par Brigite Bardot, c’est à dire vieille et fripée. Il fonce dans la circulation comme un Schumacher d’opérette avec un bruit de ferraille à faire se suicider Enzo Ferrari et bander le garagiste du coin.

Quand on parle de bander, le chien commence à ressentir l’effet de sa vision de l’autre côté de la rue. Il faut dire que la femelle est splendide : le poil soyeux, le museau fin, un port de tête royal, la croupe galbée comme… heu… et surtout ce fumet attirant des femmes à poils qui sécrètent elles mêmes leur parfum, évitant par là-même de se le renverser sur la tête. Je précise que je ne parle pas de l’odeur entêtante des aisselles broussailleuses de ma concierge, pas mal poilue elle aussi. Les héros sont des chiens, ne l’oublions pas.

Et voilà notre cador, la langue pendant dans le caniveau, le yeux révulsés, agité par les prémices de la maladie de parkinson, les queues au garde-à-vous. Il n’en peut plus, le bougre. Il souffle comme un marathonien asthmatique et fumeur.

Quel contraste avec notre chauffard de tout à l’heure, l’oeil glauque à moitié clos, bercé par les balancements de la peluche suspendue à son rétroviseur, le corps maintenu sec par la climatisation de son tas de ferraille.
Parce qu’il fait chaud, et vous savez combien le soleil peut faire tourner la tête des bien pensants. Alors, ventre et le reste à terre, notre brave toutou transformé par ce formidable désir quitte le trottoir pour aller de l’autre côté de la rue lier sa destinée avec sa comparse velue qui, appel de la viviparité oblige, ne dira pas non.

C’est alors que le chien traverse qu’arrive l’autre connard.

Et paf ! le chien.

**Version courte :**
Vous connaissez l’histoire de Paf, le chien ?
C’est un chien qui traverse une route. Une voiture arrive, et Paf!, le chien.

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