Une des coolitudes de ces derniers temps, pour se démarquer ou s’inscrire dans une tendance, est de s’auto-déclarer geek. On retrouve chez ces geeks là – dont certains bloguent même très bien – une appétence pour les gadgets improbables, de préférence avec une référence à Star Wars ou, pour les plus suspects, à Star Trek. Ils sont accros à leurs engins électroniques connectés quelle qu’en soit la taille et la puissance, jouent, passent des heures sur le web et sont également technophiles, voire techno-addicts, mais pas nécessairement techniciens et c’est là qu’il me semble qu’il manque un truc…
Quand le mot “geek” m’est apparu, un beau jour, ou peut-être une nuit (ah zut, je continue à planquer des chansons dans mes textes…), et même très probablement une nuit, au détour d’un écran cathodique de 14 pouces, il désignait alors… Un intello. Un de ceux dont les joues post-adolescentes se remettaient alors doucement d’avoir eu un moment l’apparence d’une calculatrice scientifique Texas Instruments, voire Casio. Celles-là même sur lesquelles ils étaient capables de programmer un jeu du serpent alors que les autres galéraient à y entrer une intégrale.
Le geek était de ces intellos, pas forcément binoclards, ni même premiers de la classe, mais quand même souvent assis en plein couloir migratoire des chiques de papier mâché et des bouts de gomme volants. Le geek était l’ennemi héréditaire du fan de foot et de grosses bagnoles qu’il est pourtant tout à fait capable d’être aussi. Le geek était surtout trop passionné par une matière technique, obscure aux autres parce que le geek est ingénieur dans l’âme. S’il n’obtient pas son diplôme, ou simplement qu’il ait été mathophobe avant le bac, sa passion pour les problèmes tordus le rendra susceptible d’être invité aux dîners du mercredi soir.
Le degré suprême de la coolitude du matheux geek des 90’s (oui, je sais que la coolitude du matheux, ça fait pas rêver, mais personne ne rêvait alors d’être geek) était de “faire informatique”, matière en devenir qui remplissait les rêves techniques autant que ceux d’un nouveau monde.
Car le vrai geek vit souvent une vie parallèle dans laquelle il incarne des personnages en lançant des dés aux nombres de faces variables ; il peut ainsi se passionner pour les jeux de rôles et tous les univers imaginaires. De Tolkien à Lovecraft, sa passion égare le commun des mortels qui lui attribue des inaptitudes sociales au lieu de lui comprendre une société.
Le geek des 90’s a un ordinateur et un intérêt poli pour Macintosh, réservé aux professionnels de l’édition. Il parle de son vieux Commodore 64 avec des trémolos dans la voix mais l’a remplacé par un PC qu’il a assemblé lui-même sur lequel tourne un Windows piraté ou une distribution Linux, et parfois les deux. Si le geek ose prononcer le mot “logiciel libre” devant son patron, celui-ci le prend instantanément pour un communiste. S’il ajoute que Windows est une merde liberticide, il devient un dangereux anarchiste.
De ce fait, il sera volontiers confondu avec certains de ses collègues d’amphi plus barbus, plus charnus, légèrement sociopathes et époussetant moins bien les miettes de chips constellant leurs pull-over. Ce vêtement est parfois d’une propreté douteuse qui laisse néanmoins transparaître un motif jacquard, voir même un animal effaré d’avoir été tricoté là, comme celui dont s’affublent aujourd’hui les hipsters qui tentent de nous faire croire que c’est subitement devenu de bon goût sous prétexte que c’est tendance. Ces personnages colorés, qu’une tâche de bière ne gène pas plus qu’une paire de lunettes brisées se lavent néanmoins les mains, sans quoi leur clavier risquerait d’être glissant ou collant. C’est un coup à se faire tuer dans une partie de Doom, ce qui est insupportable pour un nerd respectable.
Le geek et le nerd traînent parfois sur les mêmes bancs de fac, partagent l’espoir de trouver une copine dont le nom ne se termine pas par “.jpg” et se retrouvent éventuellement devant une soirée Star Wars. Cette saga représente en effet la quintessence de la geekerie à la fois par son univers imaginaire remarquablement fouillé, mais aussi par la rupture technologique qu’elle incarna dans le cinéma. Aucune histoire n’avait jamais été racontée de cette façon grâce à une évolution complète à la fois de la narration et de la technique mise à son service. Il y a eu un après Star Wars, tout comme il y a un après Matrix, un après Avatar, et il y aura un après Gravity, même s’il n’est pas un film geek. Le geek appréciera tous ces films ne serait-ce que pour cette raison.
Le geek est donc à la pointe et c’est peut-être là qu’il faut voir l’arrivée de la geekerie comme nouvelle revendication de la coolitude branchouille de simples technophiles accros aux réseaux sociaux qui croient qu’il faut diviser les ko par 1000 pour obtenir des Mo et qui aiment Star Wars surtout parce que c’est vintage et que R2D2 est trop drôle en sonnerie de portable. Il faut dire que les vrais geeks ont vieilli et leur ressemblent un peu. Ils ont acheté un mac (pour ne pas trop s’embêter mais bidouiller quand même avec le terminal), se sont embourgeoisés et même parfois reproduits sous forme de mini-technophiles qui savent se servir d’un iPad mieux que leurs parents. Le geek devient cool en vieillissant tout comme le gentil garçon devient épousable.
Restent nos bons vieux n3rdz au poil blanchi qui s’épuisent sur Counter Strike et sont devenus des nolife parce qu’il faut bien renommer les intellos depuis qu’ils ne sont plus des geeks.
Ainsi tourne le sens des mots.
Et vous, êtes-vous un vrai geek ? J’ai un test pour vous…
1- Quelle était la configuration de votre premier ordinateur ?
2- Quelle était la marque de bière la moins chère disponible tard le soir en 1998 ?
Et je vous épargne la question sur la disquette de boot. Vous avez cinq minutes.
PS : 1 Mo = 1024 ko
[Edit]
PS 2 : J’ai oublié de répondre à ma première question : Ecran 14 pouces, PC assemblé avec un DX4/100 (100 Mhz), 4 Mo de RAM, DD de 500Mo et fugitivement MS DOS 6.22 avec Windows 3.11. Le vendeur a jamais voulu me croire quand je lui ai dit que je faisait tourner windows 95 là-dessus (quand je pense que j’ai une mauvaise mémoire…)
Je peux répondre qu’à la première question !
Le premier pc qu’on a eut tournait pas encore à 98.
Moi j’ai connu internet avec ton père derrière qui regarde la montre tourner et qui te dit, bon ça fait 15min, stop c’est bon, click je coupe. ” mais papa ! la page à chargé qu’une foiiiiiiiiis ! ”
mon premier ( à moi ) pc je l’ai monté avec l’aide de mon papounet, acheté pièce par pièces mais il a tourné à XP.
J’ai codé mon premier site internet tout en html dessus !
Ce pécé c’est matarael, il tourne plus mais reste trèèèèès bien utilisable ! Fidele, jamais un pépin, il a 12 ans ! ♥
Maintenant Leviathan le remplce fidèlement avec sa rame de malade et ses logiciels de graphisme.
je les ♥
Merci pour ce retour aux sources !!!
Wouaaaaah, une vraie geekette avec les doigts dans les nappes et le nez dans le html.
Tiens, chez moi aussi les ordis ont un nom. Par contre, il se transmet d’appareil à appareil (encore que plus aucun ne s’appelle YODA comme le premier). Quand aux imprimantes, elles s’appellent LEELOO depuis… ben depuis le “5e élément”.
PS : j’ai modifié l’article pour ajouter la config de mon premier ordi.
“Matarael” parce que c’est le nom du neuvième, Ange de la Pluie, dans Neon Genesis Evangelion.
En pc portable j’ai eu Kaoru ( c’est Tabris, le dix-septième, Ange du Libre Arbitre. ) dans le même manga, et Anthora, un des perso inventé par moi.
Et Leviathan, comme le Leviathan.
Oui j’aime les histoires d’anges, de démon, de monstres géants ♥
Je ne suis pas familier des mangas, même si j’en apprécie l’esthétique (qui inspire très notablement ton travail), depuis Akira (le film). Mes ordis, eux, restent dans les personnage Sci-Fi féminins classiques.
La fisher au 7J !!!!
héhéhé j’ai quand même pu répondre à une question 🙂
Mouais… heureusement que t’as triché.
Il y avait de Jeanlain aussi au 7J, mais le bouchon de la Fischer se refermait mieux.
et en plus les bouchons de la fisher avaient trop la classe en porte clés 🙂
Oh lala!
Mon premier Pc, bah Internet existait même pas…. On devait taper les commandes pour lancer les jeux… Et l’écran était en noir et vert! Load ruiner…. Serpent! Un Apple !
Enfin c’est pas tout jeune tout ça!
Bonne soirée
Devant votre Pc 🙂
Ça fait remonter de vieux trucs 🙂
Naaa, j’ai plus de PC (enfin si, mais c’est pour remplacer la freebox). Un bon vieil iMac (au sens propre : il va avoir 8 ans) et ça roule (ça rame aussi, mais c’est un autre débat).
Mon premier PC était hérité de mon oncle, me rappelle même plus de la config’, mais écran monochrome, pas de souris, et l’OS c’était MS-DOS (je devais avoir 5 ou 6 ans). Une imprimante à aiguilles bien bruyante comme il faut et des jeux un peu moches (surtout en Monochrome) comme Alley Cat ou Double Dragon qui à l’époque étaient formidables.
Par contre, ça compte si je te dis que ma première console était un ATARI 2600, avec l’extension permettant de jouer à un jeu sur cassette audio (encore aujourd’hui je ne comprends pas cette sorcellerie – il faut dire que je ne cherche pas à comprendre pour garder toute la magie de ce souvenir !)
Après j’ai eu du PC monté avec des pièces de la
rue de l’arnaqueRue Montgallet, suis passé par toutes les versions de Windows (si si, même Millenium…), ai eu Internet assez tôt (avec le bruit du modem que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitreuuuuuhAh, j’ai atteint la limite du nombre de caractères dans un commentaire 😛 Il a été coupé en plein milieu !
Je racontais en gros que j’avais commencé par Basic/QBasic et suis rapidement allé vers VB mais pas trop longtemps, que j’avais un tiroir plein de CDs AOL 50h Internet, des trucs comme ça 🙂
Bref, merci d’avoir remis un peu d’histoire vraie dans le mot “geek” et rendu un peu de leur identité aux “vrais geeks” 🙂
Ben voilà. C’est bien un truc de geek, ça d’outrepasser les limites du système (Je te dis qu’on doit pouvoir faire faire un triple saut périlleux arrière à Ryu avant d’envoyer sa boule d’énergie… Si, je te dis, je l’ai déjà vu.).
Merci pour ton commentaire et pour le coup de mémoire : ta description du lecteur de cassette a fait naître une image oubliée… Vérification faite sur internet ; c’est bien ça. Je n’ai pourtant jamais eu de console.
Bruit du modem (que j’ai retrouvé cette semaine en cherchant un son pour la vidéo que je vous ai concoctée), CD AOL (et free ?), Windows Me… T’es un Vrai. T’es un Pur 🙂